shipping.jpg
  • Point valeur

ZIM - Point valeur Octobre 2021

ZIM est une société israélienne vieille de 75 ans dont l'activité est le transport maritime par conteneurs. Concurrent de taille modeste des majors du secteur, ZIM tire bien son épingle du jeu avec des spécificités qui lui sont favorables dans le contexte actuel.

Notre investissement initié début février 2021 vers 14-15$ dans le transporteur maritime ZIM illustre notre précédent article sur l’incroyable casse-tête logistique qui fait la une de tous les médias du monde actuellement. Zim est une société israélienne vieille de près de 75 ans dont l'activité est le transport de marchandises par conteneurs. Les leaders de ce marché sont des entreprises bien connues en Europe comme le danois Maersk ou le français CMA CGM. ZIM est un concurrent de taille modeste, avec moins de 2% de part de marché. A la différence des plus grands acteurs qui détiennent une part significative de leur flotte de porte-conteneurs, habituellement entre 50 et 60%, ZIM loue la quasi intégralité de sa flotte à des tiers. Nous verrons plus loin que cette spécificité a eu son importance dans le contexte que nous connaissons maintenant. Également, en l'absence de contrats long terme avec ses clients, ZIM est très exposé au marché spot (prix de marché, en instantanné), ce qui lui permet de capter une grande partie des variations de prix, à la hausse comme à la baisse.

Ces compagnies gèrent des lignes à une fréquence régulière (d’où leur nom de liner) entre deux ports, par exemple Shanghai-Los Angeles. Les principaux clients de ZIM sont les commissionnaires de transport (Kuehne + Nagel, DSV) dont la spécialité est de faire transiter la marchandise de leurs clients d’un point A à un point B en s’occupant de l’ensemble des formalités administratives et opérationnelles. Les plus grands distributeurs de la planète, Ali Baba, Amazon ou Walmart, sont également clients de ZIM.

L'introduction en bourse

Après plusieurs échecs au cours de la dernière décennie à cause de conditions de marché peu favorables au secteur et de difficultés financières en 2014, ZIM a finalement réussi son introduction à la bourse de New-York en janvier 2021. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elle fut la plus curieuse que nous ayons connue ces dernières années.

  1. Tout d’abord ZIM n’avait pas besoin d’argent et les actionnaires historiques n’ont vendu aucune action. L’opération visait essentiellement à trouver une porte de sortie à long terme pour des actionnaires « non-naturels », Deutsche Bank ainsi que plusieurs clients de ZIM qui ont été dédommagés en actions après les déboires de 2014. On notera au passage qu’aucun des plus importants “liners” n’est coté aux Etats-Unis, mais bien en Europe ou en Asie.

  2. Ensuite, elle s’est déroulée la même semaine que la frénésie sur « GameStop »(1). Ainsi, plusieurs fonds alternatifs qui ont participé à l’opération et qui étaient par ailleurs vendeurs à découvert de GameStop ont dû renoncer partiellement ou vendre précipitamment afin de financer le rachat de leurs positions en Gamestop. Aussi, d’un prix de cotation aux alentours de $15, le cours a rapidement plongé sous les $12. Par la suite, malgré des conditions de plus en plus favorables pour ZIM, le marché n’a pas semblé s’intéresser à cette entreprise inconnue, au modèle atypique dans cette industrie inexplorée par les investisseurs américains.

  3. Enfin, les sociétés d’analyse les plus importantes du secteur maritime comme Jefferies, Clarkson ou Citi étaient en charge de l’introduction en bourse, et n’a donc pas pu réglementairement assurer la « promotion » de ce nouveau venu pendant les semaines qui ont suivi le premier jour de cotation. Les premiers rapports d’analyse sont ainsi parus plus d’un mois après l’introduction en bourse. L’entreprise se préparait de plus à publier ses résultats annuels quelques semaines plus tard, et n’était donc pas en mesure de communiquer avec des investisseurs potentiels.

Outre cet ensemble de circonstances techniques favorables pour un investisseur, le document d’introduction en bourse, daté de novembre 2020, ne prenait pas du tout en compte la hausse importante des tarifs du fret, ainsi que l’expansion significative de la flotte réalisée sur le quatrième trimestre de l’année 2020. Privilégier la location à l’achat a alors été très rémunérateur pour ZIM en permettant une meilleure réactivité.

Par la suite, ZIM a publié des résultats au-delà de toute attente, multipliant par quatre ses prévisions de résultats opérationnels entre la publication des résultats annuels et celle du second trimestre en août(2). ZIM a bénéficié à la fois de l’expansion judicieuse de sa flotte dans un contexte de très forte demande, et de son exposition importante au marché spot. Une configuration idéale dans de telles conditions de marché. A noter également que les principales lignes opérées par ZIM sont les lignes Transpacifique et Intra-Asie, les plus dynamiques et celles affichant la plus forte demande, à court terme, mais aussi structurellement.

L'Allocation du capital

La question très légitime qui se pose alors est l’allocation de cette manne financière, la génération de trésorerie estimée est de près de $3.5 milliards pour 2021(3). Premièrement, ZIM a remboursé ses dettes, ce qui, on ne le répétera jamais assez, est souvent le meilleur moyen de créer de la valeur pour les actionnaires, d’autant plus lorsque les taux d’intérêts se situent à 7%. ZIM est dorénavant en situation de trésorerie positive. Un dividende spécial de $2 par action a été payé en août et, à compter de l’exercice fiscal 2021, ZIM s’est engagée à reverser à ses actionnaires entre 30 et 50% de son résultat net en dividende, soit entre $9 et $15 par action au titre de 2021(4). L’entreprise a également investi dans sa flotte de conteneurs et a signé un accord avec Atlas, le plus grand loueurs de porte-conteneurs du monde, sur la fourniture de dix vaisseaux à propulsion à gaz neufs. En échange d’un paiement anticipé , ZIM bénéficiera de loyers plus faibles dans les années à venir. En plus d’une astucieuse allocation du capital, cette opération constitue un excellent moyen de rajeunir sa flotte et surtout d’en baisser drastiquement les émissions de CO2, l’enjeu majeur de la décennie en cours pour le secteur.

Ironie du sort, malgré un cours de bourse multiplié par 3 environ depuis l’introduction en bourse(5), et une meilleure situation bilantielle, ZIM a aujourd’hui un multiple de valorisation plus bas qu’en janvier ! En effet, comme nous l’avons vu plus haut, son résultat d’exploitation, lui, devrait être multiplié par 4 !

Perspectives

Zim a déjà connu un parcours boursier extraordinaire et bénéficie pleinement de la forte demande de biens de consommation et de la congestion des ports. Néanmoins, bien que la situation actuelle soit des plus favorables, il n’en demeure pas moins que son modèle peut s’avérer fragile en cas de retournement de cycle, l’entreprise étant alors négativement impactée par ces mêmes points forts qui l’avantagent dans un marché haussier. ZIM loue ses bateaux, et devra donc continuer à payer des loyers fixes aux propriétaires même si les tarifs qu’elle facture à ses clients baissent, diminuant ainsi d’autant ses marges. De plus, travailler uniquement sur le marché spot implique l’absence de contrats de long-terme et donc une sensibilité maximale aux variations de tarifs du fret, idéale en période haussière mais risquée en cas de retournement.

Site Internet de Zim

(1) Hausse du cours importante en quelques jours due à une forme de rébellion de la part des "boursicoteurs" particuliers (2) Guidance de l'entreprise de $4-$4.4Mds à août 2021 contre $850m-$1050m en mars 2021 (3) Consensus Capital IQ (4) D'après le consensus de $30 de bénéfice par action, Capital IQ (5) Cours de référence à $45 vs un cours de référence à l'introduction en bourse de $15

Les informations ci-dessus représentent une étude réalisée par Amiral Gestion et ne constituent en aucun cas une recommandation d’investissement.